La reconnaissance d'un État palestinien est à la une aujourd'hui de l'Assemblée générale des Nations unies qui se déroule à New York.
Plusieurs pays, dont le Canada et le Portugal, ont successivement déjà annoncé une reconnaissance de l'État palestinien. Aujourd'hui, c'est au tour de la France.
52 pays du continent africain l'ont aussi déjà reconnu avec, en tête, l'Algérie qui a reconnu la Palestine comme un État depuis 1988. La plupart des autres pays qui lui ont emboîté le pas l'ont fait dans la logique de leurs résolument anticolonialistes et d'indépendance.
Mais reste le Cameroun et l'Érythrée qui n'ont pas encore entrepris cette démarche. Le Cameroun pour des raisons de coopération bilatérale et sécuritaire avec Israël. L'Érythrée, elle, préfère la neutralité. Selon les autorités érythréennes, le statut politique de la Palestine (contrôle sur le territoire, unité gouvernementale, etc.) n'est toujours pas clarifié.
Quant au Tchad, il a reconnu l'État de Palestine depuis le 25 novembre 1988, une date clé qui le place parmi les premiers pays africains à le faire, peu après la déclaration d'indépendance de la Palestine par l'OLP. Cette reconnaissance s'inscrit dans un contexte diplomatique complexe, marqué par des relations fluctuantes avec Israël et une position historiquement influencée par la solidarité avec le monde arabe.
La Reconnaissance en 1988 : Un Acte de Solidarité et d'Alignement
La décision du Tchad de reconnaître l'État de Palestine n'était pas un acte isolé, mais s'inscrivait dans un mouvement plus large de solidarité au sein de l'Organisation de la Coopération islamique (OCI) et de la Ligue arabe, deux organisations dont le Tchad est membre. En 1988, suite à la proclamation d'indépendance de la Palestine à Alger, de nombreux pays africains et arabes ont emboîté le pas. Pour le Tchad, pays majoritairement musulman, cette reconnaissance était une affirmation de ses liens culturels et politiques avec le monde arabe. Elle reflétait également un soutien aux motivés d'autodétermination et de décolonisation, des principes qui ont guidé les politiques étrangères de nombreux États africains après leurs propres luttes pour l'indépendance.
La politique étrangère du Tchad est une danse délicate entre ses alliances régionales et ses intérêts nationaux. Si la reconnaissance de la Palestine en 1988 marquait un alignement clair avec le camp pro-palestinien, les relations avec Israël ont connu un parcours sinueux.
Rupture puis Rétablissement : Initialement, le Tchad avait établi des relations diplomatiques avec Israël en 1961, mais les a rompues en 1972, comme de nombreux autres pays africains, sous la pression de la Libye de Mouammar Kadhafi. Cependant, les deux pays ont discrètement maintenu des contacts, notamment dans le domaine de la sécurité. Les relations diplomatiques ont été rétablies en 2019, sous la présidence d'Idriss Déby Itno.
Un Acte Pragmatique : Le rétablissement des relations avec Israël est un exemple de la politique pragmatique du Tchad. Le pays est confronté à des défis sécuritaires majeurs, notamment le terrorisme et les groupes armés. Israël, un acteur de premier plan dans le domaine de la sécurité et de la technologie militaire, est devenu un partenaire stratégique dans la lutte contre ces menaces. La reconnaissance de la Palestine et le rétablissement des relations avec Israël ne sont pas nécessairement contradictoires dans la diplomatie tchadienne. Le Tchad cherche à équilibrer ses intérêts, en maintenant des relations avec les deux parties du conflit, une position partagée par d'autres pays africains qui naviguent entre la nécessité de coopération et les impératifs de solidarité.
En conclusion, la position du Tchad est complexe et multifacette. Sa reconnaissance précoce de la Palestine témoigne de ses liens profonds avec le monde arabe et islamique. Parallèlement, le rétablissement de ses relations avec Israël montre une politique étrangère pragmatique, axée sur les intérêts sécuritaires et économiques du pays. Cette dualité illustre la complexité de la géopolitique africaine face au conflit israélo-palestinien.